La liberté de la presse décline chaque année, à l’analyse des données publiées le 18 avril 2019 par Reporters sans frontières (RSF). Plus des trois quarts des journalistes dans le monde exercent leur activité dans une peur et une violence croissantes.
L’indice mondial de la liberté de la presse actuelle est jugé «problématique», «difficile» ou «très grave». Seulement 8% des journalistes travaille dans un climat médiatique jugé «bon».
ChutesLes États-Unis, le Venezuela, le Brésil, l’Iran et la Chine sont parmi les mauvais élèves, chutant dans le nouveau classement.
Sur ces cinq pays, la Chine – qui, selon l’annexe du rapport de RSF, intensifie son ingérence et diffuse sa propagande non seulement localement, mais aussi dans les médias internationaux « , est classée en première place des pays liberticides, avec 177 points. Sa descente de 48 marches est d’autant plus remarquable que c’est la première fois que le climat médiatique du pays est qualifié de «problématique» dans l’index.

RSF n’a pas manqué l’occasion pour évoquer l’attaque contre le journal du Maryland, Capital Gazette, en juin dernier, lorsqu’un homme a ouvert le feu sur les locaux de la publication, tuant cinq membres du personnel. « Cela s’est passé dans une démocratie (USA) et non dans un pays réputé pour des actions contre la liberté de pensée », a déclaré Cédric Alviani, directeur du bureau Asie de l’Est de RSF. Selon lui « cette fusillade est l’un des événements les plus significatifs de la menance qui pèse contre la liberté de la presse au cours de ces 12 derniers mois ».
Toujours sur le continent américain, le Venezuela s’est également signalé, glissant de quatre places, à 148ème. En effet, sous le régime du président Nicolas Maduro, les médias publiques et les médias sociaux sont régulièrement bloqués et les critiques sont réprimées dans l’œuf. Maduro a également toujours nié l’existence d’une crise humanitaire dans le pays, bloquant l’acheminement de l’aide étrangère. En février, six journalistes américains ont été expulsés après lui avoir posé des question qu’il «n’aimait pas». « La démocratie est en grand danger », a déclaré le secrétaire général de RSF, Christophe Deloire. « Mettre un terme à ce cycle de peur et d’intimidation est une question extrêmement urgente pour tous. »
Au 172ème rang, reculant de trois places par rapport au classement précédant, l’Arabie saoudite est le pays le plus riche parmi les 10 derniers de la liste. En octobre 2018, le chroniqueur du Washington Post et critique de longue date du régime, Jamal Khashoggi, a été assassiné dans des condition horribles à l’ambassade d’Arabie saoudite à Istanbul, suscitant l’inquiétude mondiale face à la détérioration croissante de la liberté de la presse dans ce pays conservateur.
L’administration Trump a fréquemment dénoncé ce qu’elle appelle les «faux médias». Au Brésil, qui a perdu trois places dans l’indice de cette année, le président Jair Bolsonaro a également qualifié de fausses informations les histoires peu flatteuses.
Aux Philippines, qui se situent à 133ème rang du nouvel indice, en dessous de l’Afghanistan et du Nicaragua, la rédactrice en chef du journal philippin Rappler, Maria Ressa, a été arrêtée. Son organisation est connue pour ses critiques ouvertes du président Rodrigo Duterte, dont la guerre extrajudiciaire contre la drogue a suscité des préoccupations en matière de droits de l’homme.
Au Myanmar, pays qui a perdu une place dans l’indice de cette année, deux journalistes de Reuters, Wa Lone et Kyaw Soe Oo, ont été arrêtés après avoir couvert la répression militaire contre la minorité musulmane Rohingya.
Améliorations
En revanche, en Éthiopie, sous le nouveau Premier ministre Abiy Ahmed, récemment entré en fonction, tous les prisonniers incarcérés dans le pays ont été libérés et les charges retenues contre les médias de la diaspora ont été définitivement rejetées. En conséquence l’Ethiopie a progressé de 40 places, à la 110ème place.
La Gambie a également grimpé à 92, soit 30 places de plus que l’année précédente.
En ce qui concerne ces deux pays, RSF attribue cette « amélioration remarquable » à un changement de gouvernement qui a considérablement amélioré le climat des droits de l’homme dans le pays. La Norvège se situe en tête du classement pour la troisième année consécutive.
La Finlande et la Suède étaient respectivement deuxièmes et troisième.
Pessimisme
En règle générale, cependant, la situation ne semble pas optimiste, selon le représentant de RSF. «C’est pire chaque année», a-t-il déclaré. « Les démocraties semblent s’essouffler, alors que les gouvernements de plus en plus autoritaires font taire les médias. »