La présidente de Médecins sans Frontières (MSF), le Dr Joanne Liu, a déclaré à la tribune de l’ONU que, bien que la sonnette d’alarme ait été tirée pendant six mois, les réactions tardives restent insignifiantes. Selon Lui, aucune quantité de vaccins et de nouveaux médicaments ne seraient en mesure d’éviter la catastrophe qui point à l’horizon. « Six mois après la pire épidémie d’Ebola de l’histoire, le monde est en train de perdre la bataille pour la contenir », a-t-elle déclaré.

Un tableau sombre

C’est un paysage apocalyptique que le Dr Joanne Liu a présenté aux membres de l’ONU : « En Afrique de l’Ouest, des cas et des décès ne cesse d’augmenter. Les émeutes éclatent. Les centres d’isolement sont débordés. Les travailleurs de la santé sur la ligne de front sont infectés et meurent en grand nombre. Gagnés par la peur, beaucoup ont fui, laissant les gens sans soins, même pour les maladies les plus courantes. Dans ces pays les systèmes de santé entiers se sont effondrés. Les centres de traitement d’Ebola sont devenus des mouroirs (…). En Sierra Leone, les cadavres hautement infectieux sont en train de pourrir dans les rues. Plutôt que de construire de nouveaux centres de soins d’Ebola au Libéria, nous sommes obligés de construire des centres crématoires. »  

Selon une estimation rendue publique, le 28 août 2014, par l’Organisation mondiale de la Santé, 20.000 personnes en Guinée, Libéria et Sierra Leone ont été infectées pendant trois mois. Médecins Sans Frontières a doublé ses effectifs de médecins volontaires dans la région, mais est incapable de faire face à la vague.

Une intervention militaire

Dr Joanne Liu pense que l’épidémie peut être arrêtée, à condition que les gouvernements envoient des équipes et du matériel adéquat. Elle a exhorté les pays développés à mettre en branle les dispositifs déployés en cas de menaces biologiques.  « Vous avez une responsabilité politique et humanitaire à utiliser immédiatement ces capacités dans les pays touchés par le virus Ebola », a-t-elle insisté.

« Pour enrayer l’épidémie, il est impératif que les États déploient immédiatement des moyens civils et militaires. Je vous invite à envoyer vos équipes d’intervention en cas de catastrophe, soutenu par le poids de vos capacités logistiques. Cela devrait être fait en étroite collaboration avec les pays concernés. Sans ce déploiement, l’épidémie ne sera jamais sous contrôle ».

L’argent n’est pas plus un problème majeur, selon MSF, et l’aide volontaire ne suffit pas. Les équipes qualifiées et bien équipées sont nécessaires sur le terrain.

Les gouvernements doivent envoyer des experts militaires et civils qui peuvent augmenter le nombre de centres d’isolement et déployer des laboratoires mobiles qui peuvent être utilisés pour diagnostiquer davantage de cas. Les opérations de type militaire sont nécessaires pour établir des ponts aériens propres à transporter le personnel et du matériel dans les pays touchés.

Une autre approche

«Nous devons aussi tenir compte de l’effondrement de l’infrastructure de l’Etat. Le système de santé dans ces trois pays (Libéria, Guinée, Sierra Leone) s’est effondré. Les gens y meurent de simples maladies tropicales, comme le paludisme, la diarrhée. Les femmes enceintes souffrant de complications n’ont nulle part où aller… »

Enfin, la présidente de Médecins sans Frontières a dit, qu’il doit y avoir un changement d’approche par les pays touchés. « Les mesures coercitives, telles que les lois qui criminalisent la non dénonciation de cas suspects, et les quarantaines forcées, sont à l’origine de la clandestinité. Cela conduit à la dissimulation de cas et pousse les malades à s’éloigner du système de santé. Ces mesures n’ont servi qu’à reproduire la peur et l’agitation, plutôt que de contenir le virus. »

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