S’il y a un musicien de jazz qui a su combiner les extrêmes de la clarté et de l’obscurité, c’est bien le pianiste et compositeur Sonny Clark. De 1957 à 1962, sa touche précise et son sens subtil du phrasé ont été gravés sur trente et un enregistrements en studio, vingt et un en tant que sideman et dix en tant que leader, avant de mourir d’une overdose d’héroïne le 13 janvier 1963, à l’âge de 31 ans.

Quel que soit le cadre (du trio au grand orchestre) dans lesquels il a joué, ce musicien intuitif, agile et émouvant a toujours élevé le niveau de la musique.

Profondément influencé par le Bud Powell, Sonny Clark a néanmoins développé une sensibilité harmonique complexe et dynamique, pleine de nuances et de détails. Considéré comme le pianiste de Hard Bop par excellence, il a laissé un passif sans aucun mauvais enregistrement, ni en tant que sidemen, ni en tant que leader.

Les démons

Conrad Yeatis « Sonny » Clark est né le 21 juillet 1931 à Herminie, en Pennsylvanie (USA). Il était le plus jeune des huit enfants, nés de Ruth Shepherd Clark et d’Emory Clark, un mineur décédé d’une « maladie persistante de la tuberculose », comme l’indique une brève nécrologie d’un journal local, deux semaines après la naissance de Clark.

Après la mort d’Emory Clark, la famille emménagea dans le Redwood Inn. La fille du propriétaire des lieux se souvint : « L’auberge avait vingt-deux chambres, une salle de danse avec un juke-box et un flipper, et un petit magasin. Le week-end, des Noirs de toute la région venaient danser et des musiciens noirs de Pittsburgh venaient jouer. Sonny a commencé à jouer du piano à l’âge de quatre ans et il était encore très jeune lorsqu’il a commencé à fréquenter cet endroit. Il pouvait aussi jouer de n’importe quel instrument, en dehors du piano. Je me souviens de lui jouant du xylophone, de la guitare et de la basse. Tout le monde s’émerveillait de lui. »