Christophe Dawson a été hissé par le Sunday Times dans son classement des personnalités les plus riches de la Grande-Bretagne. C’est une consécration qui à la fois honore et horrifie : « Quand j’ai réalisé que j’étais devenu un milliardaire, j’ai pleuré de bonheur. Mais, j’ai également été envahi par un sentiment de peur et de solitude. Je me suis dit que le spectacle est terminé, que c’est la fin d’une belle époque. Au fond, je ne suis pas heureux d’être un milliardaire. »

Monsieur Dawson possède, entre autres, une rivière, des domaines plusieurs hectares à Plymouth (Angleterre) et une villa dans le sud de la France. Son histoire et la façon dont il a obtenu tout ce patrimoine est remarquable.

De Chico à 3D

À l’école, son surnom était « le cancre » ou Thicko. Il quitta les bancs à l’âge de 15 ans, sans qualification, à peine capable de lire et écrire. «Je pouvais écrire Chris, mais je ne pouvais pas écrire Christopher », dit-il. La soixantaine passée, Mr Dawson ne peut toujours pas écrire et n’a jamais lu un livre. Quand il se rend dans un hôtel, il prétend qu’il a oublié ses lunettes et demande au réceptionniste à remplir le formulaire de réservation à son nom et pour son compte. «Je n’éprouve aucun embarras à ce sujet », précise-t-il, en haussant les épaules.

Son père porté sur la bouteille était un marin (donc toujours absent). Sa mère pleurait toujours mais serrait les dents. Il est le plus jeune de trois frères qui ont connu des fortunes diverses à travers les quatre coins du monde. Le frère aîné, Michael, 66 ans, est un multimillionnaire qui vit en Afrique du Sud et possède une entreprise d’entretien et réparation de chaudières de navires. Son autre frère, Terry, 64 ans, est au chômage et vit dans un centre d’accueil social. « Une photo de famille très contrastée, n’est-ce-pas ? Je ne donne pas un sou Terry et il ne faudrait pas qu’il compte sur moi pour ce genre de chose. Il n’est pas une déception pour moi. Je ne pense pas qu’il soit une déception pour lui-même, parce que nul n’a le droit de gâcher ce que Dieu a mis dans ses mains. Si vous avez perdu, tant pis pour vous. Certains ne sont pas déçus parce qu’ils n’ont pas essayé de travailler dur et ils ont échoué: la dureté est au commencement de toute chose », dit-il.

Chris Dawson a commencé comme vendeur ambulant dans les marchés du Sud-Ouest de l’Angleterre. Son surnom à l’époque était Dickie Dirt Dawson (3D), comme pour souligner son charme et son sens du bagout. C’est dans ses pérégrinations ambulantes qu’il rencontra son épouse, 35 années plus tôt. « Elle voulait acheter une montre mais n’avait pas suffisamment d’argent. Je la lui ai vendue à crédit. J’attends toujours qu’elle me paie» dit-il.

Affaires de famille

En 1989, Dawson a utilisé ses bénéfices cumulés à travers  les marchés pour ouvrir son premier hypermarché dans la ville de Plymouth. Aujourd’hui, il possède plus de 88 magasins d’articles ménagers dans tout le Royaume-Uni et emploie plus de 2500 collaborateurs. Parmi eux figurent sa femme, sa fille et son fils. Tous travaillent excessivement, mais pas plus que Chris qui affirme dormir que 06 heures par jour. « Je pars à la maison quand il fait nuit et je retourne au travail avant le lever du soleil », dit-il. Ma paranoïa de tout maximiser ne le quitte jamais. Tout est commercialisable : un bout de fer, une batterie dans une poubelle, il prend le temps de s’arrêter pour le mettre dans le coffre de sa voiture. Sa femme se plaint de ne pas avoir d’espace à la maison. Il y entasse ce qui ne peut être vendu dans ses hyper marchés. Son manque d’éducation est colmaté par une intelligence vive et un zeste pour les affaires.

Points forts

Quand on lui demande quels sont les points forts d’un homme d’affaires? Mr Dawson répond spontanément: «l’organisation et le choix des bonnes personnes (…). Je vois passé ce qu’on appelle  communément des problèmes. Mais, je les vois comme des opportunités. Ma force réside dans la vision et l’instinct. Sans aucun doute, l’instinct, l’organisation et le choix des gens sont mes points forts. »

Désormais, Chris Dawson s’habille « très cher » (costume Hugo Boss, chemise Duchamp avec des boutons de manchette bijoux) et roule dans une Rolls unique, en jet privé. Il n’aime pas beaucoup regarder dans le rétroviseur ou tomber dans l’autocritique, mais se souvient avoir pleuré quand il était un petit garçon, car il n’a jamais été autorisé à se rendre à des fêtes ou carnavals, comme les autres enfants. Il rappelle également ces rares moments de générosité familiale où ses grands frères recevaient quelques pièces monnaie et pas lui.

C’est peut-être cette injustice du passé qui a fondé le succès d’aujourd’hui. « Je demandais à ma mère pourquoi j’y avais pas droit. Et elle me répondait à chaque fois que c’est parce que j’étais le plus jeune. » C’est à partir de ce moment que Christophe Dawson a commencé à courir derrière les pièces de monnaie qui, à force de travail acharné, se sont transformées en milliards de livres (£).

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