Malgré une enfance difficile dans la banlieue industrielle de Linz, en Autriche, le jeune Karl Rabeder s’était fixé un objectif: faire fortune le plus rapidement possible. Il raconte dans le magazine Allemand Spiegel : «Je suis issu d’un milieu très modeste. Je n’ai jamais connu mon père. Disons qu’entre l’alcool et sa famille, il a choisi. Je vivais avec ma mère, chez mes grands-parents. Ma grand-mère était une gestionnaire hors pair, convaincue que la valeur d’une personne se juge à ses économies. Enfant, je revendais les légumes du petit jardin maraîcher familial et je me débrouillais très bien. Adolescent, j’ai travaillé pour financer mes études de mathématiques, physiques et chimie. Très vite, j’ai volé de mes propres ailes. J’ai commencé par vendre les fleurs du jardin. Avant la fin de mes études, mon affaire de décoration d’intérieur et objets pour la maison était si florissante que je ne voyais plus l’intérêt de viser autre chose… ».

carl rabeder

Très vite, Karl Rabeder devient un homme d’affaire riche et prospère qui se marie en grande pompe en 1980 et habite une luxueuse villa dans les montagnes autrichiennes. Un immense garage abrite sa limousine les cinq avions à sa disposition.

Mais au fil des années, Karl Rabeder se sent de plus en plus étranger à l’univers des grandes entreprises et de la société de consommation.

A l’âge de 48 ans tout bascule. C’est un voyage en Amérique du Sud qui lui a ouvert les yeux : «J’ai réalisé que la plupart des gens pauvres qui vivent là bas sont beaucoup plus heureux que l’Européen moyen», explique-t-il. «On nous dit d’acheter pour notre bien-être. Mais cela ne nous rend pas heureux, alors nous achetons encore plus. Et comme nous ne sommes toujours pas heureux, nous devenons de plus en plus manipulables. Nous avançons comme des moutons, un chien à gauche, un chien à droite — l’un brandit la menace de la crise financière et du chômage, tandis que l’autre aboie qu’il nous faut des assurances hors de prix au cas où. Nous passons notre temps à préparer l’avenir sans vivre le présent. Je sais de quoi je parle, affirme Karl Rabeder. J’ai vécu ainsi pendant vingt-cinq ans, toujours plus riche et toujours plus malheureux».