Dans les pays fortement touchés par la crise économique, la vie rêvée des financiers a tourné au cauchemar. Pression, anxiété, insomnie, épuisement, licenciements, impopularité…. Après plus de trois ans d’une crise dont la paternité leur est unanimement imputée, les banquiers sont de plus en plus nombreux à consulter des psychologues, engager des recours juridiques pour cause de stress, licenciement abusif ou encore non-paiement des bonus, et à quitter le métier, de gré ou de force. Les banquiers se cachent pour verser des larmes qui malheureusement sont insufisantes pour panser ou compenser des pertes abyssales.

Le désarroi

Ils paient pour leurs excès et leur arrogance, leur propre indifférence au monde extérieur et leur omnipotence. Les seigneurs d’autrefois sont devenus des parias qui essuient les tirs croisés de l’opinion publique, des médias et des politiques. Certains banquiers en sont venus à taire leur véritable profession. Ils préfèrent mentir plutôt que de se faire insulter. Les discours anti-financiers font recette. Le monde entier les montre du doigt et les condamne.

L’Europe menace de légiférer pour limiter la rémunération des banquiers. Aux Etats-Unis, le président Barack Obama soutient les  » indignés  » et promet régulièrement de mettre Wall Street au pas, même si la loi votée en ce sens, en 2011, n’a guère changé les pratiques. En Suisse, les banquiers ont perdu le moral en raison de la lourde menace qui pèse sur le sacro-saint principe du secret bancaire. Cette situation a pour effet une chute sèche des dépôts des clients étrangers.

Un psychologue établi dans le quartier des affaires de Londres confirme l’ampleur du désarroi des banquiers: « Je vois de plus en plus d’employés en dépression, et même des grands patrons. Cet environnement est tellement compétitif qu’ils n’ont pas le droit de montrer le moindre signe d’abattement. Au contraire, ils font la course au « présentéisme ». Ils donnent leur vie à leur travail, ça fait partie du deal. Sauf que, maintenant, ils n’ont plus les mêmes garanties, notamment financières. Beaucoup choisissent de changer de voie, certains reprennent des études et les jeunes diplômés refusent d’y aller. »

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L’Argent-Roi

Alors que le secteur bancaire multiplie les licenciements (aux Etats-Unis et en Europe, le secteur a perdu 120 000 emplois) et que les rémunérations variables chutent (chez Goldman Sachs, le  » bonus day  » a tourné au vinaigre avec une baisse de 40 % des primes) au profit des salaires fixes, la crème de la finance apparaît toujours aussi réticente face à l’autocritique. Le mea culpa n’est toujours pas de saison. La plupart pleurent leurs bonus perdus alors qu’ils ont plongé le monde dans la crise.

Dans ce milieu, l’argent, c’est la seule reconnaissance. Sans bonus, on n’est plus rien. Il n’y a aucune logique sociale ni éthique. « De l’extérieur, ils sont si étrangers à nos préoccupations qu’on a du mal à imaginer qu’ils soient en état de souffrance. Quand on parle de bulle financière, il s’agit aussi d’une bulle qui les sépare du reste de la société. Ils sont tellement habitués à brasser des sommes considérables que les montants des indemnisations leur paraissent dérisoires. Ils ont la conviction qu’on leur fait porter le chapeau » confirme un psychiatre.

Notis©2013