«Je l’ai appelé Morgan» est à la fois un portrait des gens et un paysage historique, une vision virtuelle de l’époque américaine – la vie des Noirs américains avec la discrimination de facto dans le Nord du pays – et la naissance d’un style artistique identitaire et contestataire.

La voix d’Helen

Helen Morgan, née en 1926, a eu une jeunesse dure en Caroline du Nord et est venue à New York dans les années quarante, alors qu’elle était encore une adolescente, pour essayer de tracer sa propre voie. Elle a travaillé comme opératrice de téléphone, a fréquenté des clubs de jazz et est devenue une sorte de célébrité locale, transformant sa maison en salon virtuel où les artistes et les esprits libres venaient échanger.

Au même moment, Lee Morgan, né en 1938, était une jeune star de trompette, un artiste adolescent mais déjà célèbre. En 1960, il avait enregistré avec John Coltrane, Dizzy Gillespie, Tina Brooks, Sonny Clark, Wayne Shorter… à l’âge de dix-huit ans. Il devînt un membre des « messagers du Jazz » d’Art Blakey, l’un des groupes les plus populaires et avant-garde de l’histoire du Jazz Contemporain.

En rapportant les autre entrevues des principaux musiciens de l’époque qui ont connu et joué avec Lee Morgan, comme Shorter, les batteurs Albert (Tootie) Heath et Charli Persip, les bassistes Paul West et Jymie Merritt, le documentaire de Collin fait renaitre la vie nocturne de cette époque où soudain tout semblait s’accélérer : des voitures aux aventures sexuelles en passant par les accoutrements vestimentaire fins. Le batteur Charli Persip parle de la course de voiture nocturne dont raffolait Lee Morgan. Albert Heath mentionne les excès de vitesse tard dans la nuit à travers Central Park. Shorter parle des concerts dans des boîtes de nuit où le cognac coulait à flot. Il y avait aussi des drogues, et Morgan est devenu accro à l’héroïne.