Qui détient effectivement le pouvoir? Qui a le charisme pour gouverner? Qui est le chef ? Est-ce lui qui fonde et soude le groupe, ou est-ce parce qu’un groupe se crée qu’il émerge comme indispensable ?

Quoi qu’il en soit, qui dit « groupe » dit meneur, qu’il soit chef, gérant, Président directeur général, prof, proviseur, ministre, premier ministre ou encore Président de la République…

L’autorité

Au travail, à l’école, au sein de tout groupe, la relation aux autres est la plupart du temps une relation hiérarchique : quelqu’un a été nommé pour diriger. C’est le chef institutionnel, et son simple statut fait qu’il est perçu comme supérieur, seul au sommet. Ses subordonnés lui sont soumis par principe. C’est une vision caricaturale, certes, mais ancrée dans la conscience collective.

Ce qui fonde l’autorité, c’est l’idéalisation de la personne. C’est une image de compétence, d’influence ou de pouvoir. Toute relation authentique avec le chef, toute prise de conscience désacralise le chef, dissout – en partie ou totalement – la relation d’autorité.

La question à se poser, en tant que leader d’un groupe, est par conséquent celle de sa relation aux autres : trop de proximité, trop de confidences nuisent à l’image de pouvoir.

Quelle image le chef veut-il/doit-il donner de lui-même ?

La « personne centrale »

Tous les dirigeants savent que, même s’ils sont officiellement investis de l’autorité (statutaire ou constitutionnelle), il peut arriver – hélas ! – qu’ils n’en soient pas la « personne centrale »… La personne centrale, c’est celle ou celui (parfois le (la) plus ou moins ancien(ne)) qui polarise une émotion collective : chaque membre du groupe est relié à elle de manière affective. Elle peut donc venir concurrencer le chef institutionnalisé, ou au contraire venir conforter son leadership.

Dans un groupe, ou face à un groupe, il est souvent essentiel d’identifier cette personne, de se situer par rapport à elle. Si les deux rôles coïncident, chef institutionnel et personne centrale, alors le leader est légitimé, le groupe est stable et peut travailler dans de bonnes conditions. Si la personne centrale est une autre personne que le leader institutionnel, il est indispensable de l’identifier et de comprendre pourquoi elle a pu ainsi cristalliser l’émotion. Lorsque c’est chose faite, deux modalités de gestion du groupe se dessinent :

1) la négociation avec cette personne est possible: le leader exploite la cohésion du groupe en donnant avec tact les indications et les directions ;

2) la négociation est impossible : la personne centrale refuse toute coopération, en général parce qu’elle veut prendre la place du chef. Le conflit est alors difficile à éviter.

Les profils

En fonction de l’émotion ressentie, on peut dégager différents types de personnes centrales :

• Le patriarche (la sécurité) : il est d’aspect sévère, bon et juste, sécurisant et respecté. Il est facilement obéi, influence durablement ses collègues, mais aucun ne rêve d’être comme lui…

• Le leader (l’admiration) : encore jeune, habile – voire expert – dans son domaine, il est proche des salariés qui souhaitent lui ressembler. Il peut engendrer le désir de le surpasser dans le futur.

• Le tyran (la peur) : c’est un maniaque de la discipline, qui inspire une vraie crainte aux autres : ils se soumettent mais se méfient les uns des autres. Son sadisme est contagieux… pas de cadeaux, pour personne !

• Le héros (la révolte) : c’est celui qui finit par se révolter contre le tyran. Les autres sont alors libérés et se soudent autour de lui, d’autant plus fort que la tyrannie était pesante. Il garde longtemps son prestige.

• Le sale type (l’agressivité) : il est plus modéré que le tyran, mais il est haï par tous. Les autres membres du personnel se dominent pour éviter ses sanctions, ce qui les rend très solidaires, unis par leur hostilité envers celui qu’ils considèrent comme un anti-modèle.

• Le chéri (l’amour) : tout le personnel féminin en est amoureux, elles fusionnent dans l’adoration de leur idole. Les hommes sont fascinés et voudraient intérioriser ce fichu pouvoir… Bien entendu, cela marche aussi dans l’autre sens : la chérie existe…

• Le « busynesseur » : il fait du « business », il trafique, il ravitaille et permet la réalisation de désirs interdits ou réprimés. Il déculpabilise ainsi ceux qui participent avec lui à des plaisirs défendus.

• Le séducteur : il est perçu comme un déviant, qui aurait eu le courage de passer à l’acte. Ses camarades sont à la fois tentés et déculpabilisés. Véritablement séduits, ils se sentent autorisés à se conduire comme lui. Il est redoutable s’il est chahuteur, car le chahut sera généralisé.

• Le mauvais exemple : proche du séducteur, il n’aime pas passer à l’acte. Il exerce une influence négative qui ne s’exprime jamais ouvertement. Par sa seule présence, il encourage les autres à transgresser les règles, mais lui ne se mouille pas. Il est donc d’autant plus redoutable qu’on ne peut pas le sanctionner.

Notis©2012

Sources :Travailler en équipe par E. Mathey et F. Mérillou