Des scientifiques ont constaté que le risque de maladies cardiaques est plus élevé chez les salariés qui travaillent au-delà de 45 heures par semaine. Analysant la relation entre les heures de travail et les maladies cardiovasculaires, les médecins ont diagnostiqué des anomalies cardiovasculaires, notamment l’angine de poitrine, la maladie coronarienne ou insuffisance cardiaque, la crise cardiaque, l’hypertension artérielle ou l’AVC, chez 43% des participants.

Globalement, une heure supplémentaire augmenterait le risque d’événements cardiovasculaires de 1%. Les travailleurs à temps plein ayant une ancienneté de plus de dix ans serait plus touchés que les travailleurs à temps partiel, précise l’étude.

«Karoshi »

Les travailleurs japonais semblent les plus atteints par les conséquences néfastes des heures supplémentaires. En effet, au Japon, la durée commune de travail est de 60 heures par semaine. Dans ces conditions, l’équilibre « vie privée – vie professionnelle » n’existe pas et les livres conseillant comment travailler de façon plus productive afin de passer plus de temps en famille sont rarement lus. Le terme le plus employé dans le monde du travail japonais est « Karoshi » qui signifie « la mort par surmenage »

Selon Koji Morioka, professeur émérite à l’Université du Kansai, « Dans le monde du travail japonais, le travail supplémentaire est la norme ». Alors que la semaine de travail de base est de 40 heures, de nombreux travailleurs font des heures supplémentaires par crainte d’être taxé de mauvaise performance par leur supérieur hiérarchique. Cela a conduit à la notion de « service supplémentaire (« service » signifiant en japonais « libre »), en lieu et place de celle de « heures supplémentaires de travail ».

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« karoshi » est la conséquence de ce programme implacable : attaque cardiaques fatale, accident vasculaire cérébral et suicide déclenché par le surmenage sont qui devenus les cause la plus répandue de la mort en milieu professionnel.

Les chiffres du ministère du Travail montrent que 189 travailleurs sont décédés de cette façon en 2015, bien que les experts pensent que le nombre réel va dans les milliers.

Le Karoshi a longtemps été considéré comme un problème masculin, cependant on note un nombre croissant de femmes qui meurent, presque toujours par suicide. Ce qui frappe, c’est que ces victimes sont très jeunes, souvent dans leur 20ème année, a déclaré le secrétaire général de l’association des victimes de Karoshi.

Une fois que la mort est classée comme karoshi, la famille de la victime a automatiquement droit à une indemnisation financée par la cotisation sociale des travailleurs. Le nombre de demandes pour les affaires liées à karoshi a atteint un niveau record de 2,310 en une année. Mais, moins d’un tiers des demandes sont couronnées de succès.

Le changement de culture

Bien que karoshi existe depuis plusieurs décennies, ce n’est qu’en mars 2015 que le gouvernement japonais a pris le problème à bras le corps. La loi fixe des objectifs spécifiques, tels que la réduction du pourcentage d’employés pouvant travailler plus de 60 heures par semaine à 5% d’ici 2020.

karoshi03Le gouvernement essaie aussi d’amener les employés à prendre effectivement leurs congés annuels payés. La plupart des travailleurs japonais ont droit 20 jours de congé par an. Mais, une majorité prend à peine la moitié des jours de congés auxquels tout salarié a droit, à cause d’une culture qui veut que la prise de jours de congé soit considérée comme un signe de « fainéantise » ou un manque de motivation. Le gouvernement espère inciter les travailleurs à prendre au moins 70 pour cent de leur congé dû.

Malheureusement, « la loi ne pénalise pas les entreprises qui enfreignent les règles », ont déploré les représentants du ministère de la santé et du bureau de travail pour la prévention des karoshi. Le problème de karoshi est exacerbé par la faiblesse relative des syndicats, qui sont principalement focalisés sur l’augmentation des salaires plutôt que la réduction des heures de travail. La pratique bien japonaise de « un emploi pour la vie » est également un frein à la lutte contre la mort par surmenage. La plupart des étudiants, après l’obtention de leur diplôme, entrent dans une entreprise ou un ministère avec l’espoir d’y rester jusqu’à leur retraite. Le vieillissement de la population qui signifie encore moins de personnes disponibles pour le travail et l’augmentation des charges sociales montre que Karoshi est un dragon qui ne sera pas facile à terrasser.

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Pour Morioka, professeur de droit social, l’élimination de la mort par le surmenage signifie changer toute la culture de travail du Japon : « Nous devons changer la culture des heures supplémentaires et de créer le temps pour la famille et les loisirs. Les longues heures de travail sont à la racine de tout le mal du Japon. Les gens sont tellement occupés qu’ils n’ont même pas le temps de se plaindre », a-t-il conclu.

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