Le 22 janvier 2015, le philosophe, Bernard-Henry Lévy, s’exprimait dans le cadre de la séance plénière des Nations Unies consacrée à l’antisémitisme. Extrait d’un discours poignant :

Si vous m’avez invité, ce matin, ce n’est pas pour chanter l’honneur et la grandeur de l’humanité – mais c’est pour pleurer, hélas, les progrès de cette inhumanité radicale, de cette bassesse, qui s’appelle l’antisémitisme.

Bruxelles où l’on s’en est pris, il y a quelques mois, à la mémoire juive et à ses gardiens. Paris où l’on a réentendu l’infâme cri de « Mort aux Juifs » et où l’on a tué des dessinateurs parce qu’ils dessinaient, des policiers parce qu’ils faisaient la police et des juifs parce qu’ils faisaient leurs courses et qu’ils étaient juste juifs. D’autres capitales, beaucoup d’autres, en Europe et hors d’Europe, où la réprobation des juifs est en train de redevenir le mot de passe d’une nouvelle secte d’assassins – à moins que ce ne soit la même, dans de nouveaux habits.

Votre Assemblée avait la sainte tâche de conjurer le réveil de ces spectres.

Mais non, les spectres sont de retour – et c’est pour cela que nous sommes ici.

Sur ce fléau, sur ses causes et sur les moyens d’y résister, je veux d’abord, Mesdames et Messieurs, Monsieur le Secrétaire Général, Monsieur le Président, réfuter un certain nombre d’analyses courantes qui ne sont faites, j’en ai peur, que pour nous empêcher de regarder le mal en face.

Il n’est pas vrai, par exemple, que l’antisémitisme soit une variété parmi d’autres du racisme. Les deux doivent être combattus, bien sûr, avec une détermination égale. Mais l’on ne combat bien que ce que l’on comprend. Et il faut comprendre que, si le raciste hait dans l’Autre son altérité visible, l’antisémite en a, lui, après son invisible différence – et, de cette prise de conscience, va dépendre la nature des stratégies que l’on pourra et devra mettre en œuvre.